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Le besoin d'attachement est universel, mais ne se réalise pas toujours de la manière que les humains le souhaitent. Les perturbations au niveau de ce besoin fondamental laissent des traces indélébiles dans le développement d'un individu, au point de façonner sa personnalité, non pas pour le meilleur, mais bien pour le pire. Malheureusement, à l'heure actuelle, personne n'est vraiment en mesure d'enrayer ce phénomène, surtout lorsqu'il s'amorce dès l'enfance. De nombreux adultes, perturbés à ce niveau, sont livrés à eux mêmes, sans réelle possibilité de compenser leur déficit affectif. Car, à la base d'un besoin d'attachement pathologique, se trouve une carence affective, qui n'a pas de rapport direct avec l'absence d'un lien relationnel, mais plutôt avec son mauvais fonctionnement.

„ La haine est une émotion qui ne vient pas naturellement à l’enfant. Elle doit lui être enseignée. Un parent qui apprend à son enfant à détester l’autre parent représente un grave danger pour la santé mentale et émotionnelle de cet enfant.“

- John Gomery -

Dans un attachement sain, ce n'est pas la quantité qui compte, mais la qualité. Cette qualité, qui se trouve dans la relation gratifiante, est caractérisée par son aspect inconditionnel. L'enfant se sent accepté, non pas pour ce qu'il représente, mais pour ce qu'il est. Un attachement marqué par le sceau de la réciprocité désintéressée est le meilleur garant d'une vie adulte épanouie.

Dans l'aliénation parentale le besoin d'attachement de l'enfant est profondément chamboulé. Le parent qui provoque cette perturbation induit un vrai traumatisme chez l'enfant, dont les conséquences insoupçonnées sont difficilement corrigeables, sans une prise de conscience de la part des protagonistes, des observateurs directs ainsi que des intervenants éventuels.

Un attachement aliénant influence de manière déterminante le développement de la personnalité d'un individu qui s’y trouve soumis. Ses répercussions sur la société sont globales, puisque ce sont des mécanismes relationnels vitaux qui sont en jeu. Ils vont alors conditionner toutes les relations interpersonnelles du sujet affecté.

Face à ce phénomène, il est facile d'accabler, ou au contraire de disculper totalement, le parent aliénant. La première attitude est privilégiée par ceux qui considèrent la malveillance comme étant la marque de fabrique de ces parents. La seconde est partagée par ceux qui n'accordent pas une importance particulière au besoin d'attachement ou qui considèrent que le parent écarté contribue, notamment par son attitude passive, à rendre la situation problématique. Aucune de ces estimations est adéquate, dans la mesure où le fond du problème n'est compréhensible que par l'observation directe des origines et de l'évolution du besoin d'attachement. Or personne n'est vraiment à même d'effectuer cette analyse, c'est à dire d'être à la fois acteur et observateur, puisque cela impliquerait de vivre avec les principaux protagonistes, qui ne sont en réalité plus que deux, le parent aliénant et son enfant. L'autre parent, pour des raisons qu'il importe de cerner avec une grande lucidité, a été écarté.

Une chose est cependant sûre : chacun, à sa mesure, se trouve, en dépit de cette situation particulière, directement influencé par son besoin d'attachement. D'abord l'enfant, le principal intéressé, voit son besoin d'attachement renforcé, en raison de la perte du lien provoquée par l'absence de l’autre parent. L'enfant ne s’interroge pas sur cette absence, qu'il considère plutôt une défection. L’aliénation nécessite, de sa part, de focaliser son attention sur le seul parent désormais susceptible de le satisfaire sur ce plan là, qui est vital pour lui.
Ensuite, le parent aliénant, qui ne tolère plus l'interférence de l'autre parent, se trouve lui-même dans une situation, qu'il a provoquée consciemment ou inconsciemment, remplissant toutes les conditions pour affirmer son propre besoin d'attachement, notamment à travers une relation presque exclusive avec son enfant. En d'autres termes, le parent aliénant est convaincu que son besoin d'attachement est étroitement lié à celui de l'enfant et qu'il s’effectue dans ses meilleurs intérêts, comme de ceux de son enfant. Par conséquent, la relation avec son enfant doit demeurer exclusive.

Il est important de souligner que cette croyance est également validée par l'entourage de ce parent, ainsi que par les intervenants externes qui voient dans cette attitude, pourtant très possessive, le signe d'un attachement sain et fort. Ce qu'il n'est pas en réalité, si l'on tient compte que la quantité de cet attachement s'exerce au détriment d'une qualité essentielle : son inconditionnalité, qui brille en réalité par son absence. Or le besoin d'attachement étant universel, le regard des observateurs se fixe, de manière erronée, sur sa manifestation extérieure, qui est la présence physique du lien, sans minimement tenir compte de son aspect perverti, qui n'est observable que par l'enfant. De son côté, l’enfant, particulièrement s' il est jeune, n'a pas de point de repère, ni de comparaison, pour justifier le malaise profond qui l'anime.

L'enfant n'a qu'un désir: se défaire de ses émotions négatives et plus particulièrement de l'angoisse qui l'étreint quand le nom du responsable de son malheur est évoqué. En faisant sortir hors de sa conscience cette présence gênante, c'est à dire ce parent éjecté de la triade familiale, l'enfant pense résoudre l'équation douloureuse qui lui est soumise. La solution qui s'impose est une évidence, qui ne souffre d'autant plus d'aucune discussion, qu'elle émane du seul parent encore présent dans sa vie. Le seul, sur lequel il peut, en définitive, compter au quotidien. Et Dieu sait à quel point un enfant vulnérable a besoin d'une telle présence pour exister.

Une fois que l'enfant à pris le plis de cette forme d'attachement, son destin est plus ou moins scellé.